Le principe de The Creature est que toute personne intéressée pouvait passer commande à Lauren Huret pour faire une vidéo d’art centrée sur leur propre présence en ligne.
Depuis l’avènement des réseaux sociaux, les comportements en ligne fascinent Lauren. La manière dont les gens partagent des fragments de leur vie, construisent leur image, se mettent en scène, se promeuvent… Malgré un certain scepticisme, ce phénomène est absolument captivant — en particulier l’incroyable quantité d’informations et d’images que chacun et chacune choisit de livrer, volontairement, à ce qui tient lieu d’espace public : Internet.
Dans son travail, Lauren compare l’acte de partager sa vie en ligne à un geste de diffraction, voire de démantèlement — une dispersion de fragments de son âme et de son être, comme autant d’indices de son passage sur Terre. Observateur critique des médias, souvent enclin à adopter un regard plus occulte sur le monde, elle voit ces morceaux d’identité — offerts à qui veut bien les voir — comme de minuscules spectres, des fantômes flottants, conservés, mais à jamais dissociés.
À partir de ces réflexions, elle recueillait, rassemblait et reconstituait, sur demande, ces fragments numériques que chacun et chacune laisse derrière. C’est un portrait de l’ère de l’information, à l’époque du partage massif. C’est le fruit d’une enquête que Lauren menait sur une personne, une archive temporelle d’un “moi numérique”.
La première œuvre de cette série a été commandée par le musée Haus der Elektronischen Künste à Bâle, en Suisse, dans le cadre de son programme Net Encounters. Il s’agissait d’un portrait du commissaire d’exposition du musée, Boris Magrini.