Performance 2017-2018

Gabriela Löffel

Performance, 2017-2018

Installation, projection vidéo 2 canaux, hautparleurs, 25 min

Videostill © Gabriela Löffel

Intitulée Performance (2017-2018), l’installation vidéo multicanaux de Gabriela Löffel illustre un moment aussi bien de formation que de déconstruction. Filmée à partir de plusieurs angles dans une salle de conférence vide, l’œuvre suit Amy Carroll, une coach en communication orale, et son protagoniste, Rudi van der Merwe, en train d’écouter très attentivement un extrait audio enregistré auparavant par Löffel lors d’une foire commerciale portant sur l’industrie de la sécurité. S’étant familiarisés avec le matériel, Carroll et van der Merwe vont retravailler les mots et la posture du conférencier invisible, dans la zone de confort de leur cadre solitaire, et transformer ce qui était vraisemblablement une présentation maladroite (l’original est traversé d’hésitations) en une introduction parfaitement réglée et convaincante. Même l’invitation « à attacher votre ceinture de sécurité et à profiter de la promenade » – plaisanterie qui, dans la version de l’homme de sécurité anonyme tombe désespérément à plat – donne l’impression d’être un chef-d’œuvre de gravité et de confiance après avoir reçu le traitement de Carroll.

Gabriela Löffel

Performance, 2017-2018

Installation, projection vidéo 2 canaux, hautparleurs, 25 min

Split-screen still © Gabriela Löffel

D’emblée, l’approche analytique de Löffel semble porter sur la forme, mais ce qu’elle vise vraiment c’est le contenu. Rarement la sécurité, qui est un aspect fondamental de la société contemporaine, est-elle abordée en termes aussi techniques et académiques. Le contexte dans lequel a lieu cette allocution (une foire commerciale) indique clairement que le principal moteur qui anime les parties présentes n’est pas le partage de connaissances ou l’investigation de nouvelles possibilités, mais le désir de s’assurer une part importante de marché dans un secteur très rentable en pleine croissance (par exemple, des régions ou pays déchirés par un conflit ou, encore, en train de développer une technologie requérant une protection). Lorsque considérée de ce point de vue, la technique de formation utilisée par Carroll, qui inclut des exhortations comme « c’est mon boulot d’assurer votre réussite » ou « les gens puissants prennent du temps et de l’espace » donnent particulièrement froid dans le dos. Mais si l’idée d’une sécurité personnelle à plusieurs facettes, régie exclusivement par des règles morales, est quelque peu naïve, la manière dont se déroule la discussion soulève des enjeux essentiels sur la notion même de « protection », glissant dangereusement en territoire orwellien. Le fait que la performance de Carroll et de van der Merwe se déroule devant un ensemble d’appareils, qui en saisissent la moindre nuance et le moindre accent, accentue davantage l’ironie de la situation. Le penchant de Löffel à montrer comment le geste le plus simple peut ébranler la plus complexe des structures est illustré ici par une brève séquence en noir (black-out) qui sépare le segment de coaching et l’interprétation finale du texte. C’est un moment inattendu et puissant qui rappelle combien la technologie la plus complexe et efficace peut souvent mener à la vulnérabilité lorsqu’elle se fait complaisante.

Texte de Michele Robecchi
Traduit en français par Colette Tougas
Optica Centre d’art contemporain, Montréal, 2021

« Löffel arbeitet mit einer professionellen Sprechtrainerin, der sie den Auftrag erteilte, ein Coaching mit einem Probanden basierend auf der genannten Aufzeichnung zu machen – als gelte es die Ansprache zu optimieren. Es ist eine gebuchte Trainingssequenz und der junge Mann übt tatsächlich einen Auftritt; in ‚echt‘, nicht im Spiel, wie die Künstlerin mir erzählte, weil ihr wichtig war, dass es sich nicht um eine darstellerische Leistung handele, sondern um eine möglichst reale Situation, eben die eines tatsächlichen Sprech- und Auftrittstrainings – mit dem einzigen Unterschied, dass die Inszenierung im leeren Konferenzhaus der technischen Hochschule von Lausanne eine gezielte Versuchsanordnung war, in der die Beteiligten der Abmachung folgten, real miteinander interagieren zu müssen. Löffel arrangierte das Setting und machte allein die Vorgabe, das Training filmen und künstlerisch nutzen zu dürfen.

Es handelt sich folglich um ein Stück, das mit dem Modus „as if …“ operiert und durch mehrere Eingriffe und Verschiebungen eine Unschärfe in der Inszenierung zwischen Echtheit und Fiktion erzeugt – und genau an diesem Punkt scheint mir Löffels Spiel mit den „Elementen des Wirklichen im Sinne einer Versuchsanordnung“ zu beginnen: Da ist zunächst die wirkliche Rede, ein Dokument, eine glaubwürdige Quelle, die, gleichwohl sie nur eine mediale Aufzeichnung ist, echt wirkt – nicht zuletzt aufgrund ihrer Rohheit und Nichtoptimiertheit, in der der unsichere Klang der Stimme des CTO stark mit dem Inhalt des Gesprochenen kontrastiert; dann gibt es die beiden Personen, die zwar als Performende auf einer Bühne, aber nicht als Schauspielende eines vorher gegebenen Stückes wahrgenommen werden. Die Szene selbst – die sie darstellen, aber nicht spielen – verdoppelt ihrerseits bereits das Darstellungsproblem, handelt es sich doch um eine Übung für einen Auftritt als Auftritt. Dieser aber findet zwar vor laufendenden Kameras, zugleich aber in einem leeren Saal statt, in dem das Publikum imaginiert werden muss. Es wird von Amy Carroll, der Sprechtrainerin, lediglich virtuell anwesend gemacht, wenn sie über mögliche Publikumsreaktionen spricht und Rudi van der Merwe bittet, sich die Menge vorzustellen und die Aufmerksamkeit jedes*r Einzelnen zu gewinnen. Und doch fehlt das Publikum nicht ganz: Wir, die Betrachtenden der Arbeit, sind die Zuschauenden, an die sich das Geschehen adressiert – ohne sich an uns zu richten.»

Extrait du texte de Sigrid Adorf (en allemand), à lire en entier sur le site de insert.art

À consulter:

Gabriela Löffel

Performance, 2017-2018

Installation, projection vidéo 2 canaux, hautparleurs, 25 min, extrait

Vidéo © Gabriela Löffel

Credits:
Coach en communication orale: Amy Carroll
Locuteur: Rudi van der Merwe

Lieu de tournage:
Swiss Tech Convention Center EPFL, Lausanne, Suisse


REPÉRAGES ET PROCESSUS

Gabriela Löffel

Photographies, repérage, International Security Fair, Londres, Royaume-Uni, 2021

Photo © Gabriela Löffel