Décrite par certaines critiques comme une improbabilité dramatique sans signification musicale, l’aria Vissi d’arte marque toujours une pause dans l’opéra de Tosca. Annoncé par un énorme rallentando et diminuendo, son tempo passe d’un allegro nerveux à la relative tranquillité de l’andante lento appassionato. En d’autres termes, ça ralentit avant d’exploser.
En 1885, après avoir vu une représentation de Tosca avec Sarah Bernhardt dans le rôle principal éponyme, Giacomo Puccini se déclarait bouleversé par l’intensité dramatique de la pièce de théâtre. Ne maîtrisant pas la langue française, son émotion devait surtout à la diction, aux gestes et aux aspects visuels de l’action.
Avec ses dispositifs pré-modernistes de doublage et de répétition, Tosca est l’une des premières performances sur la performance. Le simulacre y est constamment remis en jeu, tant entre les personnages qu’auprès d’un public qui en connaît aujourd’hui l’issue tragique. Reflétant l’un des principes fondamentaux de la musique, la variation naît de la répétition: les thèmes présentent, identifient et accompagnent les personnages tandis que les gestes circulent d’un individu à l’autre.
Remis à l’agentivité des pièces de l’exposition, ces gestes confrontent ici les codes de deux formes de productions culturelles, ouvrant un espace propice à la réflexion sur les possibilités d’actualisation des enjeux thématiques et formels transposés d’un champs artistique à un autre.
Anaïs Wenger
Vissi d’arte, 2020
Vue de l’exposition personnelle dans la Salle Crosnier, Genève, Suisse
Photo © Greg Clément